paroles

DEMAIN A L'AUBE

(c) 2024 Gerald Massois

Paroles : Gerald MASSOIS

 

 

1 - 1939 (Instrumental)

 

2 - Les ennemis d’hier

J'avance sous une chaleur torride,

Aveuglé par le vent.

Sur les restes brûlants et humides,

D’un tragique testament.

Je me glace,  je comprends.

 

Une paix sans espoir

N'efface pas la peine.

Une guerre sans victoire

Ne brise pas les chaînes.

Dans les regards,

Je ressens la peur

D'un sombre destin,

D'un monde en pleurs,

D’une vie sans lendemain.

Tel un bateau ivre,

Je réapprends à vivre

Avec mes ennemis d'hier,

Avec mes propres frères…

 

Un mur de cendres obscurcit la ville

Réduite à néant.

Je reste là figé, immobile,

à observer les gens.

Je me glace,  je comprends.


Une paix sans espoir

N'efface pas la peine.

Une guerre sans victoire

Ne brise pas les chaines.

Dans les regards, 

Je ressens la peur

D'un sombre destin,

D'un monde en pleurs,

D’une vie sans lendemain.

Plus rien n'importe,

Me touche, me réconforte.

Je n'ai que pour seule prière,

L’espoir de retrouver mon frère…

 

3 - La bataille del'Ebre, Pt. 1

 

4 - La bataille de l’Ebre, Pt. 2

Depuis cent jours nous défendons,

Sur une terre aride,

Une colline sans nom

Dans une guerre fratricide.

Après des heures d'un dur combat

Survient une accalmie.

Un silence lourd s'impose là,

Fugace illusion d’un répit,

Un message,

D’un funeste présage.

 

Soudain au loin,

Un bruit sans nom 

Détonne à l'horizon.

Le sol tremble sous nos pieds,

Nous fait tous chanceler.

Nous nous croisons tous du regard,

Un ultime au revoir,

Tout se fige à cet instant…

Dans l'attente d'un dénouement

Implacable,

D’une danse avec le diable.

 

Et dans le silence,

Une évidence

D’un grand crépuscule de verre.

Nous périrons dans

La chaleur d'un nuage de fer.

Le ciel s'obscurcit,

Et sans un cri,

Pris dans une issue funèbre,

Nous nous noierons

Dans les eaux sanglantes de l'Ebre.

 

Soudain les murs volent en éclats,

Soufflent violemment nos corps.

Nous mordons nos bouts de bois,

Priant fort ce dieu qui dort. 

La poussière nous habille

D’un dernier manteau d’aiguilles,

Qui nous comprime sauvagement,

Et nous mutile jusqu’au sang...

Jusqu’au sang…

 

Sous une pluie cendrée de feu,

Tombant sous la mitraille,

Le carmin couvrant nos yeux

S'échappant de nos entrailles.

Nos corps, futiles brindilles,

S’embrasent, vrillent et vacillent.

Nous restons plaqués au sol,

Attendant que la mort enfin

Nous dévore,

Ou d’un revers nous ignore... 

 

A quoi bon se battre,

Si même l'espoir,

N’est plus qu’un château de cartes ?

Le bien, le mal, 

Nous semblent désormais illusoires.

La peur dans son règne

Trahit nos sens, 

Nourrit nos cœurs d’impuissance.

Dans la poussière

Des fourneaux brûlants de l'enfer.

 

5 - Les trains d’ombres

Une foule se forme lentement

Sur les quais d’une gare,

Emplit machinalement 

Des trains d’ombres qui s’égarent

Sur les voies troubles de l’espoir. 

 

Qu’espère-t-elle retrouver ainsi

A l’issue du voyage ?

L’illusion d’avoir repris

Une route libre de péage ? 

Comme les autres j’ai pris la file

D’un aller simple pour revoir ma famille,

De reprendre

Le contrôle de ma vie.

 

Et si on me croit mort,

Si plus personne ne m’attend, qu’on m’ignore…  

Pris dans la spirale de l’oubli. 

 

Après deux jours d’un long voyage,

Je regagne ma terre, 

Ma mère me prend le visage ,

Dans ses bras, en pleurs, elle me serre. 

« Tu dois te montrer si fort mon fils.

Ton frère est mort, pris dans une injustice.

Lis ces lettres, tu comprendras peut-être… »

 

Je crie ma colère, 

Je prie pour que ce ne soit qu’une chimère, 

Je ne reverrai plus mon frère…

 

Quand l’aube du soir

Vient toucher ma fenêtre,

Me laisse l’illusion de croire

Au miracle peut-être…

J’ai l’espoir,

Le temps d’un instant fragile,

D’entrevoir au loin

Surgir de nulle part

Ton ombre de la nuit…

 

6 - Une colline sans nom (Instrumental)

 

7 - L’encre des maux

Lettre n°1

 

J’ai traversé le cours de ma vie

A contre-courant,

Remonté le fleuve de mes envies,

Fier et arrogant.

J’ai délaissé longtemps ma famille

Pour découvrir la ville,

Tel un oiseau qui fonce fébrile,

Vers les lumières qui brillent.

 

Dans ton cœur,

Te souviens-tu de nos fous-rires d’enfants ?

Ce temps semble loin maintenant…

Je ferme les yeux et je perçois les essences 

Des champs d’œillets qui enivrent de leur fragrance.

 

Le soleil s’efface devant la pluie

Dans une dernière danse.

Dans cette guerre, je n’ai pas choisi,

J’ai joué de malchance.

D’un pont de pierre à moitié détruit,

J’ai jeté à l’eau

Les dernières pages d’une lettre que j’écris

A l’encre des maux.

 

Entends-tu,

Le bruit des pas de l’armée du silence ?

Qui frappent les pavés de l’absence… 

Des silhouettes de brume

Qui marchent dans le vent

Et qui disparaissent dans le néant.

 

On nous force à nous battre

Contre l’autre jusqu’au sang.

Mais la mort s’en fiche ouvertement !  

Et la vie colore

De gris tous nos sentiments

Qu’elle délave sans discernement.

 

Le reflet de ta photographie

S’efface doucement,

Et ton visage s’évanouit

Dans les limbes du temps…

 

8 - Demain à l’aube

Lettre n°2

 

Demain à l’aube je ne serai plus

Qu’un nom sur un mur perdu.

Sentence implacable,

Je vais mordre le sable.

 

Il ne faut pas que tu me pleures,

Tu dois comprendre je n’ai plus peur.

Serein et lucide,

Je me jette dans le vide.

 

Je n’ai pas choisi mon camp,

J’aurais préféré les vivants.

Mais Il est trop tard et inutile 

De fuir ce qui se profile…

 

Les soldats viennent me chercher,

Je me hâte de terminer,

Je lève la tête, je reste digne,

Sans remords,

J’accepte mon sort,

La mort !

 

J’avais décidé 

De m’enfuir,  

Mentir, désobéir,

Quitter l’enfer, regagner ma terre…

 

J’avoue qu’il est dur de mourir,

Trois ans de guerre m’ont fait mûrir,

Je ne suis plus l’enfant

De tes souvenirs.

 

J’ai fait des choses qu’on ne peut nommer,

Sache que je pars l’esprit libéré,

Absous des péchés

Qui m’ont dévoré.

 

Quelle est cette guerre sans nom

Qui nous pousse à tuer sans raison ?

Perfide poison qui pervertit nos âmes,

Qui assombrit

Notre propre sang

De ses flammes…

 

Adieu mon frère,

Embrasse notre mère !

Adieu mon frère,

Je reste libre et fier !


Il est l’heure

D’un au revoir. 

Prends ton temps,

Sois patient…

 

9 - Les passagers du vent

Epilogue

 

Les souvenirs d’antan

Se patinent lentement.

Avec le temps

Disparaissent les rires des enfants.

 

Et même ton visage

S’envole comme une poussière d’étoile,

Sans que j’envisage

De tourner la page

D’un passé qui se fait la malle.

 

Le bruit sourd de la mer,

Douce mélodie éphémère,

Berce dans l’ennui

La vieillesse qui reprend le pli.

 

Et quand la solitude

M’emplit le cœur d’incertitudes

Recousues de fils, 

D’une main fébrile,

Une cicatrice indélébile…

 

Le temps nous sépare,

Nous laisse seuls, 

Seuls sur les quais d’une gare.

Il nous laisse seuls,

Bien seuls,

En simples passagers du vent…

 

Quand viendra le soir,

Bien en retard,

Je laisserai loin derrière 

Mon vieux corps en âge 

Pour aller rejoindre la Lumière.

 

Nous vieillissons seuls 

Portés par les vents d’opale,

Bien emmitouflés dans nos linceuls

Ce soir nous lèverons le Grand Voile…

 

 

 

 

 

cover photo by Anke Sundermeier